Chabat, plus que Kipour
Au traité Chabat 119B les Sages enseignent tout celui qui dit ‘’vayéh’oulou’’ dans la prière du vendredi soir ses fautes sont effacées ! Pourquoi ? Le Gaon Rav Avigdor Miller zal (Torat Avigdor page 281) explique : c’est bien là le plus grand repentir, parce qu’en comprenant correctement ce passage on reconnaît que D’IEU est le Maître de tout et que le monde tient sur sa parole, que sans D’IEU rien n’existe ! Ce moment dépasse même le jour de Kipour. Là l’homme offre à D’IEU le plus grand sacrifice : sa pensée, parce que durant le Chabat l’homme pense à cette vérité absolue qu’il n’y a rien d’autre si ce n’est que D’IEU. La reconnaissance du pouvoir objectif de D’IEU dans le monde est le plus grand repentir. Celui qui ne vit pas avec cela dans son esprit il est tel un animal, il n’accède à rien, sa vie est vide. Chabat c’est la prise de conscience que le monde est l’œuvre divine, l’expression de la volonté divine, et que le monde continue d’exister par cette volonté divine. Le repentir ne se limite pas à la prise de conscience de nos fautes, mais plutôt à notre rapport au divin et à la place totale divine dans le monde. Là est l’enjeu essentiel du Chabat. C’est la raison pour laquelle lorsque Moché parle de la construction du Tabernacle aux Enfants d’Israël il ne manque pas de leur rappeler l’importance du Chabat, la demeure du juif qui rayonne du Chabat et de son message dépasse de loin le Tabernacle, de ce fait ors de la construction de l’édifice saint il fallait stopper toute activité (l’arrêt de travail ne concerne pas seulement le travail profane, mais même le travail saint ne peut être effectué le jour de Chabat !).
Chabat et Parnassa
Le Bné Yissah’ar (Dereh’ Pikoudéh’a) nous rappelle à l’ordre ! Chabat est de se rappeler que D’IEU créa le monde ex-nihilo selon sa volonté. Si et puisque D’IEU a créé le monde et continue de le gérer IL se soucie et assure la subsistance de toute créature. Notre investissement dans le travail n’a pas pour but de se substituer à D’IEU pour gérer nos affaires. Là où l’homme se trouve il peut trouver sa parnassa sans avoir besoin d’aller trop loin. Le H’ovot Halévavot rapporte qu’un homme voyageait pour assurer ses affaires financières, durant un de ses voyages il rencontra un idolâtre. Ce dernier le questionna sur l’existence de D’IEU. Notre homme lui expliqua que D’IEU créa le monde et subvient aux besoins de chacun. L’idolâtre lui répondit : ton comportement contredit tes propos, si tu crois en D’IEU tu n’as pas besoin de faire de tels déplacements ! Effectivement de là où tu te trouves, D’IEU a, selon ton discours, les moyens de répondre à tes besoins. L’effort de l’homme ne lui assure pas de gagner davantage, et sans trop d’efforts il recevra ce que D’IEU a fixé pour lui, c’est cela le message de Chabat.
Chabat et perte d’argent
Le Choulh’an Arouh’ O’’H (334-26) stipule qu’il est strictement interdit de transgresser Chabat afin d’éviter une perte d’argent, cet interdit inclus l’interdiction de transgresser Chabat ne serait-ce qu’en enfreignant des lois dites ‘’midérabanan’’ – imposées par les Sages. On peut s’interroger pourquoi il ne serait pas permis de transgresser Chabat pour une autre personne afin de l’aider dans son désarroi afin qu’il ne devienne pas fou en voyant tous ses biens se détruire ? Le Choulh’an Arouh’ O’’H 306 et Michna Béroura 9 et 330, 1 disent qu’on peut transgresser Chabat pour une personne malade afin de lui éviter de perdre la raison ! De même nous savons que la tora a autorisé de tuer le voleur qui vient en cachette – ‘’ba bémahtéret’’ et si durant le jour de Chabat on voit un voleur chez soi on a le droit de le tuer ?
Le Gaon Rabi H’aïm Kanievski chalita a répondu : lorsqu’une personne doit perdre tout son argent c’est un décret du ciel et rien ne lui autorise de transgresser Chabat sur cela (il doit accepter le décret céleste !). Le ‘’ba bémahteret’’ c’est différent il vient lui-même voler dans l’intention de tuer…
Le Gaon Rav Moché Shternbuh’ chalita a répondu : la question n’a pas lieu d’être, il n’y a aucune permission de transgresser Chabat afin de ne pas devenir fou voyant tous ses biens disparaître. Le voleur armé qui vient voler en cachette il vient lui-même mettre la vie du propriétaire en danger s’il ne lui donne pas le code de son coffre-fort, on est ici dans un contexte de légitime défense. Le cas du malade c’est différent, le risque de sa folie n’est pas la raison de la transgression du Chabat, mais si on le laissait ainsi et qu’il en perdrait la raison sin état de santé risquerait de s’aggraver ce qui le mettrait en danger.
(Tiré de Iyoun Haparacha, Inyané Chabat Kodech – page 132).
N’oublions pas de rappeler que nous touchons là une des questions les plus sensibles liées au Chabat : lorsque Chabat et l’argent s’opposent… certes l’épreuve est immense, et sans aucun doute le mérite de respecter grandement Chabat même au prix de devoir perdre tous ses biens matériels, est immense. Fort heureusement (!) tout le monde n’est pas confronté à ce genre de situation, qui restent tout de même assez rare, mais malgré tout il m’a paru important de le rappeler, parce que j’entends souvent des gens qui ne respectent pas (encore) Chabat prétextant que leur patron ne les libère pas pour ce jour et que s’ils venaient à faire Chabat alors ils seraient licenciés. Ces considérations n’ont aucune place dans la réalité du Chabat, tout aussi difficile que cela est Chabat doit être respecté même au prix de perdre son travail ! Fasse Hakadoch Barouh’ Hou que tous trouvent la force de faire Chabat à TOUT PRIX, et que tous trouvent la bénédiction dans le domaine de la subsistance matérielle. N’oublions pas que Chabat est en soi la source de toutes les bénédictions, à ne pas manquer… Aucune perte d’argent ne justifie la transgression du Chabat.