« Acher Kidéchanou Bémitsvotav » par Rav Moché Mergui-Roch Hayéchiva
La TORAH dit (PARACHAT KEDOCHIM 19-2) : « Hachem parla à Moshé en disant : ‘Parle à toute la communauté des enfants d’Israël et dis leur : ‘Soyez Saints car JE suis Saint MOI L’ET… votre D.’».
La TORAH s’adresse à chacun d’entre nous et nous ordonne d’être Saints. En quoi consiste cette Mitsvah d’être KADOCH et comment atteindre cet objectif ?
La Mitsvah de la sainteté que la TORAH attend de chacun de nous est réalisable :
1/ DANS L’ACTION : La pratique de chaque Mitsvah est précédée de la Bénédiction Acher Quidéchanou Bémitsvotav Vétsivanou [Qui nous a sanctifiés par l’accomplissement de ses Mitsvoth]
2/ DANS LA PENSEE : la KEDOUCHA [la sainteté] réside dans la pensée qui accompagne l’action, c’est-à- dire : j’accomplis la Mitsvah parce que c’est HAKADOSH BAROUKH’ HOU qui nous l’a ordonnée, et non parce que la logique l’exige. Voici un exemple cité dans la Torah : « Révérez chacun votre mère et votre père et observez mes Shabbats. »
C’est au même titre que je respecte le Shabbat que je dois du respect à mes parents, et non pas seulement parce que je leur suis redevable et reconnaissant pour tous leurs bienfaits.
3/LE COMPORTEMENT : la KEDOUCHA nécessite de s’éloigner des rapports sexuels interdits : à chaque
endroit où il y a une barrière contre l’immoralité, on trouve la KEDOUCHA.
Pour le RAMBAN, il s’agit de se sanctifier dans les actes permis par la TORAH, comme il est dit : « KADECH ATSMAH’ BEMOUTAR LAH’ », c’est-à-dire de s’abstenir d’abuser, même au sujet des choses qui sont permises.
Au cours du mariage, le H’atan s’adresse à la Kalah et lui dit avant de lui remettre l’alliance : « Aré at mékoudéchet li » [Tu m’es sanctifié par cette alliance »]. Dans la TORAH, la vie de couple constitue une authentique sainteté !
Le KADICH récité pour un proche parent est une proclamation de la Sanctification du Nom divin dans ces moments douloureux.
Le KIDOUCH du vendredi soir et des fêtes est récité pour la sanctification du temps.
En conclusion, le Rav Moshé Haïm LUZZATO nous enseigne que la KEDOUCHA consiste pour l’homme à vivre dans un état d’union avec le Divin, à un point tel que, quelle que soit l’action que l’homme accomplit, il soit toujours relié avec HAKADOSH BAROUKH’ HOU.
KEDOCHIM TIYOU !
L’Histoire- par Rav Immanouel Mergui
La fête de Pessah’ est derrière nous mais son message nous accompagne au quotidien et ce jusqu’à la venue du Machiah’, comme nous l’avons cité dans la Hagada de Pessah’, l’opinion des Sages est que nous parlerons de la sortie d’Egypte même dans les temps messianiques ! Il y a donc dans cet évènement un message intemporel. Cela veut dire qu’à travers ce que nous vivons au quotidien nous devons intégrer la sortie d’Egypte pour vivre pleinement notre quotidien. Les évènements actuels s’inscrivent pleinement dans les messages de la Tora et de la sortie d’Egypte en particulier. Pour n’en citer seulement un échantillon. Nous avons vécu, en France en tout cas, cette année Pessah’ 5752 par l’élection présidentielle de notre cher Président Monsieur Emmanuel Macron, barouh’ hachem ! Un peu plus loin en Europe une guerre dure depuis quelques mois (entre la Russie et l’Ukraine) et nous sommes aux aguets de ce qu’il se passe là-bas sans que cela nous empêche tout de même de dormir tranquillement la nuit. Certes on ne porte pas sur nos épaules la souffrance du monde maisilyaledangerde l’indifférence quant aux souffrances des autres… Bien évidemment sans omettre de parler des évènements qui se passent en Erets Israël – envers laquelle nous sommes davantage liés ! Et si les attentats nous exacerbent et
nous peinent, rappelons encore une fois le décès du Grand Maître de la génération en la personne emblématique de Rabi H’aïm Kanievsky zeher tsadik vékadoch livrah’a. Si la question est de savoir comment vivre tous ces évènements qui écrivent l’histoire dans laquelle nous nous trouvons, il est de toute évidence que chaque fait a son message particulier. La question qui surgit dans mon esprit est de savoir quelle est la vision de la Tora sur tout ce qui se trame dans le monde ? On ne peut pas faire fi des chapitres de notre histoire. Si les états sont tous d’accord qu’il faut enseigner l’histoire du passé aux élèves, ce qui se défend bien évidemment, je pense qu’il nous faut également voire surtout enseigner l’histoire du présent à nos enfants (ainsi qu’à nos adultes d’ailleurs). L’histoire n’appartient pas aux médias, qui pour ma part sont les véritables détracteurs de l’histoire. En tout cas nous devons nous tourner vers la Tora pour comprendre l’histoire, du passé, du présent, et donc du futur. Les Maîtres de la Tora se penchaient sur le sens des épisodes qu’ils rencontraient dans leur ère. Pour ne parler que d’un exemple : nous approchons de Lag Baomer (cette année mercredi 18 mai au soir), et chaque année on se remémore le chapitre de Rabi Chimon Bar Yoh’aï qui passa douze années (en vérité c’est treize années) de sa vie dans
une grotte avec son fils Rabi Elazar. Ce qui est moins connu ce sont deux questions fondamentales : 1) pourquoi s’est-il réfugié dans une grotte ? 2) qu’est-ce qu’il a fait dans ce confinement durant tout ce temps ? Posons une troisième question : pourquoi la Hiloula de ce géant de la Tora a- t-il était perpétré dans le temps plus que tout autre maître et tsadik des générations ? Et il y a encore beaucoup de questions ! Si on ne sait pas y répondre alors Lag Baomer devient un grand barbecue où les merguez sont reines ! Dramatique !
Le Talmud au Traité Chabat 33b raconte que trois Maîtres, dont Rabi Chimon Bar Yoh’aï, discutaient de ‘’politique’’, plus exactement ils s’interrogeaient si les romains étaient des gens convenables envers Israël ou non !? Chaque Maître argumentera sa thèse… Etc. Je veux seulement rappeler que les Sages d’Israël se penchent sur ces questions que j’appelle ici l’Histoire Présente. Cela veut dire que dans la grandiosité de la Tora on trouve réponse à l’actualité. Et, me semble-t-il, c’est un des problèmes de notre génération qui pense que l’histoire (ou la politique) n’appartient pas à la Tora. Dramatique ! La Tora s’occupe de tout. La Tora n’est pas qu’une question de pratique de commandements, la Tora c’est découvrir la volonté de D’IEU dans Son monde où d’ailleurs IL nous a octroyé une place. Rien
(ni personne) n’est exclu de la Tora. A l’approche de Chavouot, la fête du Don de la Tora, il nous faut intégrer ce principe fondamental, qui est d’ailleurs lui-même l’unique objectif de la sortie d’Egypte ! La Parole Divine est on ne peut plus claire dans le Livre de Chémot 3-12 « Je t’envois pour sortir le peuple de l’Egypte afin que vous serviez D’IEU sur cette montagne »-ceciestdittoutau début du projet de la sortie d’Egypte !
Ce qui me tracasse dans tout ce sujet c’est l’absence manifeste de parler de D’IEU. Quelle place reconnaissons-nous à D’IEU dans ce qui se passe dans le monde ?
Je voudrais rappeler une prière quotidienne que nous disons tous les matins (de certains qui la chantent le Chabat matin) : dans la première bénédiction qui précède le Chémâ nous récitons le passage ‘’Lakel Barou’h’’ ! Qu’est-ce que nous y disons ?
« Lui Seul est élevé et saint, IL réalise des évènements puissants, IL crée des nouveautés, IL est le maître des guerres, IL sème des bienveillances, IL fait germer des délivrances, IL crée des guérisons, sublime dans ses louanges, maître des prodiges, qu’IL innove chaque jour par sa bienveillance l’œuvre de la création, IL fait les grands luminaires, sa bonté est éternelle !!! »
Il y a tellement de choses sensationnelles dans ce texte qui nous permettent de trouver la force, l’énergie, l’élan, de
redémarrer chaque jour à nouveau avec une nouvelle force les aléas de la vie.
D’IEU gère le monde. Ne pas parler de D’IEU dans les épisodes quotidiens de notre vie est notre faiblesse.
Ce texte ouvre en nous rappelant que D’IEU est seul dans son monde, que seul Lui le gère et ce dans tous les domaines.
Les Grands Maîtres de la Tora nous l’enseignent chacun en ses mots qu’on citera ici avec l’aide de D’IEU.
Notre Grand Maître Le Maharal de Prague ztsal commente : il est dit dans le livre de Dévarim 4-39 « tu sauras et ramèneras à ton cœur que D’IEU est l’Eternel dans les cieux au-dessus, sur la terre en-dessous, il n’y a rien d’autre ». Il ne faut pas traduire ‘’il n’y a pas d’autre dieu’’ mais le sens de ce verset est ‘’il n’y a rien d’autre dans le monde que D’IEU bénit soit IL’’ ! Par conséquent tout ce qui a été créé n’a d’autre sens que de louer D’IEU et lui donner révérence et louange. Ainsi cela nous conduit à comprendre que seul D’IEU donne la vie à toute créature. Le Chla rajoute : c’est cela la foi absolue ! D’IEU EST LA VIE ! Le Nefech Hah’aïm et le Tanya voient dans ce concept l’exercice de s’annuler devant D’IEU, l’unique existence est ce qui se rattache à D’IEU… Enfin le rabi de Kotsk disait : rien de ce que l’homme voit n’existe véritablement, seul ce qu’il voit par les yeux de son esprit est existant !
De toute évidence, et avec le respect immense que je
ressens envers ces Maîtres géants de la Tora, il est impossible ici de traiter dignement de leurs riches réflexions et propos à ce sujet. Je vous invite à consulter le Maharal Dérachat Chabat Hagadol édition Mah’on Yérouchalaïm page 2 à 8 avec les annotations de Rav Yéhochoua David Hertman chalita (notamment la note 10). Nous ne parlons pas assez de D’IEU, et pourtant IL est l’histoire.
Je donnais un jour une conférence devant des jeunes, l’un d’eux m’a dit pourquoi D’IEU a laissé la Shoa se faire ? De toute évidence je n’ai aucune explication sur ce sujet délicat. Je lui dis cependant : je ne sais pas répondre à cette question mais je constate que tu ne cesses de la poser à tout religieux que tu rencontres, on a au moins le bénéfice que tu parles de D’IEU…
Fasse D’IEU que nous puissions ouvrir les yeux correctement pour voir sa magnificence, sa présence, qu’IL est le Maître de l’histoire !
Parachat Kedochim
Réprimander
Au chapitre 19 verset 17 la Tora cite le commandement de
réprimander. Un mitsva difficile, notamment parce que
l’homme aime faire des reproches aux autres mais il lui est insupportable lorsque les autres lui en font ! Le verset dit « tu réprimanderas ton prochain ». Dans Alim Litroufa (page 331) l’auteur rapporte une lecture intéressante : tu dois te réprimander à travers ton prochain, c’est-à-dire lorsque tu vois que ton prochain a une qualité que tu n’as pas tu dois t’inspirer de lui pour travailler et acquérir cette qualité ! Comme le rappelle Rav Ben Tsion Moutsapi (Dorech Tsion page 334) n’oublie pas de te réprimander avant de réprimander les autres ! Il cite également les propos du Alchih’ qui dit qu’on doit s’inclure dans la réprimande que l’on fait à l’autre en lui disant au pluriel ‘’allons, ensemble, corriger nos erreurs’’. Le Gaon Rabi Ezra Attia zal apprend ce principe du Cohen Gadol, le jour de Kipour il apportait l’expiation à tout Israël mais la Tora nous dit qu’il doit au préalable apporter son sacrifice et celui de sa famille et seulement après celui de tout le peuple (Maâyan Hachavouâ page 275).
Transfert de données
Au chapitre 19 verset 29 la Tora nous dit que si l’on faute la terre se débauche. Rachi commente : si vous vous comportez mal la terre d’Israël détournera sa production vers d’autres pays ! Le Melits Yocher explique : la bénédiction de la terre d’Israël ne s’éteint jamais, si on n’est pas méritant alors cette bénédiction va ailleurs. Rav Yoh’anan Reiner (Vétaher Libénou page 545) s’exclame : cela veut dire que chaque être humain a un lot de bénédictions qui lui est fixé à Roch Hachana et lorsque l’homme faute sa bénédiction va chez un autre, et bien souvent cet autre n’est pas son ami ! par sa faute l’homme détourne la bénédiction qu’il doit recevoir vers une autre personne. Cela me rappelle l’enseignement du H’ovot Halévavot : celui qui médit offre tous ses mérites à la personne sur laquelle il a parlé et lui-même récupère toutes les fautes de sa victime !
Le haut niveau d’Israël
La Paracha ouvre en ces termes ‘’Kédochim Tiyou’’ – soyez saints. Rachi explique que ceci a été dit ‘’béhakhel’’ – à toute la communauté rassemblée. Nous devons tout d’abord comprendre pourquoi est-il besoin de noter ici que Moché s’adresse à tout le peuple ? Une autre question est à soulever : la sainteté est un niveau supérieur dont on serait à même de comprendre qu’elle ne s’adresse peut-être pas à tous, pourquoi parler de ce niveau extrême à toute la communauté, n’est-ce pas là l’exercice d’une certaine élite ?! Le Gaon Rav Eliyahou Meir Bloch de Telz développe une idée fondamentale (Ets Hadaat) : c’est précisément lorsqu’on parle de sainteté qu’il faut s’adresser à tout le peuple car le peuple d’Israël dans sa structure est saint, si l’individu n’y arrive pas il sera peut-être pardonné mais en ce qui concerne le peuple la sainteté est une notion majeure et fondamentale qui ne connaît aucun compromis !