« Vous parlerez aux yeux ! » par Rav Moché Mergui, Roch Hayéchiva
Deux frères inséparables ! Moshé Rabbenou et Aaron HaCohen ! Les voici tous deux confrontés à la rude épreuve
du Rocher.
Parler au Rocher ou le frapper ? Peut-être fallait-il poser la question : que faire exactement, dans de telles circonstances ? Ne fallait-il pas s’assurer de la définition précise de l’Ordre divin ? S’agissait-il juste de l’Ordre que le Rocher laisse produire de l’eau en abondance, en ce moment critique où les Béné Israël réclamaient désespérement de l’eau ? De l’eau ! Au secours !
Fallait-il profiter de cette circonstance pour faire comprendre aux Béné Israël que c’est HACHEM Qui donne tout : la Vie, l’air, l’eau, la nourriture, c’est-à-dire TOUT, ainsi qu’il est dit dans la Bénédiction « CHEAKOL NIHYA BIDVARO », que TOUT a été créé par et selon SA parole.
Voyons le texte de plus près (BAMIDBAR 20-7) : « Hachem parle à Moché en disant : prends le bâton et rassemble la communauté ».
Le verset suivant précise que HACHEM ajoute « (…) Toi et Aaron ton frère, VOUS PARLEREZ AU ROCHER devant leurs yeux (ils doivent voir) et le ROCHER donnera ses eaux ».
Cet ordre précis nécessite cependant quelques clarifications.
- De quel bâton s’agit-il : le Bâton qui est devant Hachem.
- « Toi et Aaron vous parlerez au rocher devant leurs yeux. » Quel est le rôle de Aaron HaCohen ? « Ensemble vous parlerez ».
- Enfin, la question se pose : pourquoi Moshé Rabbenou a-til frappé le rocher, alors qu’il est bien dit « Vous parlerez au rocher ! » ? Et quelles sont les paroles qu’ils doivent dire ?
Moshé et Aaron rassemblent la Communauté et Moshé Rabbénou dit : « Ecoutez ô rebelles, est-ce que de ce rocher nous pourrions faire sortir de l’eau pour vous ? » Moché Rabénou qualifie ainsi les Béné Israël de rebelles.
En disant : « POURRIONS NOUS faire sortir de l’eau ? », et même si Moshé Rabbenou emploie une formulation au pluriel, il paraît s’attribuer ce pouvoir ! Or c’est Hachem qui fait sortir l’eau du rocher ! Pourquoi n’a-t-il pas dit : C’est Hachem qui va faire sortir de l’eau du rocher à votre intention » ?
Devant le déchaînement des Béné Israël et leur comportement agressif et de panique exigeant de l’eau immédiatement, Moshé Rabbenou a estimé qu’il fallait frapper le rocher pour leur faire comprendre que, eux, méritaient des coups ! Finalement le but semblait atteint, l’eau est sortie, le peuple a bu et a été très content et satisfait.
Mais la fin ne justifie pas les moyens ! Hachem adresse ce reproche à Moshé et Aaron : vous avez manqué de EMOUNA en MOI, pour Me sanctifier aux yeux des Béné Israël. Leurs yeux ont vu que Moshé frappait le rocher. L’objectif n’a donc pas été atteint.
Or Hachem désirait précisément que leurs yeux voient et retiennent l’enseignement fondamental de deux frères, Moshé et Aaron, parlant fraternellement au rocher, au Nom du Créateur, et disant : ‘donne tes eaux pour désaltérer Mes enfants assoiffés et qu’ils retiennent la leçon de la fraternité.’
Celle-ci figure dans le psaume 133 : « Iné matov ouma naïm chévète hakhim gam yah’ad [Voici qu’il est beau et agréable lorsque les frères résident ensemble]. » Car c’est ici, précisément dans ce cas, que Hachem a donné Sa Bénédiction : la Vie pour l’Eternité.
l’Amour 4 – par Rav Imanouël Mergui
S’il est important d’aimer il est également important d’être aimé. L’homme ressent le besoin d’être apprécié de tous. C’est normal, lorsqu’on fait quelque chose on veut qu’il soit estimé par tous. On recherche comment se faire aimer. Il me semble même qu’on s’investisse davantage dans le ‘’se faire aimer’’ plutôt que d’aimer l’autre. Or bien souvent l’amour qu’on reçoit est celui qu’on partage. L’amour qu’on reçoit des autres dépend de celui qu’on sait témoigner ! On ne peut pas attendre de l’amour de l’autre si on ne lui en donne pas.
Cet amour qu’on attend des autres est vrai aussi bien de la part de D’IEU que de la part des hommes, je veux dire que l’homme recherche et désire être aimé par D’IEU et par les hommes. Là est la question comment obtenir ce double amour ? Comment être aimé par D’IEU et par les hommes ? Peut-on oeuvrer pour obtenir ce double amour, si vital et existentiel ?
Au traité Bérah’ot 17A Abayé nous délivre le secret pour y arriver ! « L’homme doit être rusé dans la crainte de D’IEU – il doit chercher et trouver toute sorte de moyen pour accéder à la crainte de son Créateur, explique Rachi. Répondre avec tendresse. Apaiser la colère. Augmenter le Chalom avec ses frères, ses proches et avec tout homme et même avec le non juif qu’il rencontre. Ainsi il sera aimé d’En Haut, chéri d’en bas, et sera bien accueilli par toutes les créatures.
On disait que Raban Yoh’anan ben Zakaï a toujours été le premier à dire Chalom même aux non juifs ». C’est tout un immense programme qui se résume en deux mots : Yira – la crainte et Chalom ! Pour être aimé il faut investir dans ce sens. On ne peut pas être aimé si on ne tient pas compte des autres.
La Yira, la crainte de D’IEU. Tout d’abord le Maître dit ici quelque chose de très puissant. La crainte de D’IEU conduit à ce que D’IEU aime l’être animé de sa crainte ! Comment arrive-t-on à ce niveau ? S’il existe de nombreux ouvrages qui en traitent, ici le Maître nous invite à trouver par nous-mêmes et en nous-mêmes cette crainte de D’IEU. C’est-à-dire qu’on ne doit pas libérer notre esprit de cet objectif noble en soi de craindre de D’IEU, ceci nous conduira à bénéficier de l’amour de D’IEU. Chalom. C’est bien là un programme immense qui commence par les quelques conseils que nous délivre le Maître. Contrairement à la Yira pour le Chalom le Maître nous indique un programme.
Ici l’objectif ne suffit pas, il nous aide concrètement à devenir un être de Chalom. Là il décrit trois exercices fondamentaux :
1) Répondre avec tendresse. La tendresse verbale, qui est un gros travail en soi, nous permet de recevoir l’amour des autres. Parler tendrement crée et impose une atmosphère qui inspire l’amour. Ce qui est intéressant est que le Maître emploie le verbe ‘’répondre’’, ceci va au-delà du parler tendre, il faut savoir répondre tendrement même à celui qui nous énerve.
2) Apaiser la colère. D’ordinaire l’homme sait amplifier les nerfs de l’autre et sa propre colère ! La colère est une réaction impulsive face à une situation qui nous déconcerte. L’apaisement de l’être exige une maîtrise de soi absolue ce qui va engendrait une réaction posée et apaisante. On a le droit de réagir lorsque quelque chose nous déplait mais rien ne nous autorise à nous emporter sauvagement et avec colère. Apaiser la colère, c’est apaiser sa propre colère et celle des autres. Tâche plus difficile certes mais abordable.
3) Être en Chalom avec tous, le CHALOM POUR TOUS. Ceci nous paraît tellement improbable, comment le Maître nous conseille d’être en paix avec tout le monde sans aucune exception ?! Le Chalom est un programme immense certes, mais celui-ci commence par la volonté d’être en paix avec tout le monde. Oui il faut le vouloir, il y a des gens qui ne cherchent pas la paix, pire encore ils font tout pour détruire la paix, pour créer la discorde et la mésentente !
Malheureusement il y a certaines personnes qui n’ont qu’un seul projet celui de créer constamment une mauvaise ambiance !
Sans plus tarder, empressons-nous de mettre en pratique les conseils du Maître c’est ainsi qu’on augmente l’amour et qu’on se fait aimer de D’IEU et des hommes !
Parachat H’oukat
Juif fidèle ou juif boulette
La Tora nous parle de l’exercice de la vache rousse comme étant une ‘’h’ouka’’. Certains traduiront par loi irrationnelle, ou loi dont la raison nous échappe. Il existe de nombreux point de vue sur la question de la définition du ‘’h’ok’’ dans la Tora. Les plus grands Maîtres se sont penchés sur cette étude passionnante, notamment Rambam, Ramban, Rachi, Maharal etc. Mais à un niveau très basique on peut raconterl ’histoire rapportée par Rav Gamliel Rabinovitch (feuillet Tiv Hakéhila n° 571). Il y avait un juif qui habitait dans un village lointain, il était le seul juif de la région. Il n’avait pas de problème avec les gens du village il travaillait avec eux et s’entendait très bien avec eux, chacun respectait la religion de l’autre.
Un jour ses amis non juifs lui disent : pourquoi es-tu habillé différemment de nous ? Porte les mêmes habits que nous, tu n’as pas besoin d’avoir un bout de tissu sur ta tête et des fils qui pendent à tes vêtements ! Vu qu’il n’avait pas beaucoup étudiait il ne savait pas quoi leur répondre et expliquer le sens de ses vêtements, alors il suivi leur conseil et se mit à s’habiller pareil que ses amis. Il se passa la même chose pour les lois de la cacheroute. Voilà qu’un jour ses amis du village lui disent : on a vu que tu te rends quotidiennement à la synagogue mais que tu pries seul, si tu es d’accord on vient une fois par semaine prier avec toi dans ta synagogue et toi tu te joins à nous une fois par semaine dans notre lieu de culte. Vu qu’il ne savait rien expliquer il accepta, jusqu’au jour où il abandonna toute pratique de Tora. Voilà cela est le ‘’h’ok’’, que nous devions le comprendre ou pas, que nous puissions le comprendre ou pas, à un moment il faut savoir dire que ce que je fais c’est D’IEU qui me l’a ordonné et je reste fidèle à sa parole, sinon on fini par ne plus rien faire, à s’assimiler et se perdre. La Tora à tout prix sans ne rien enlever qu’on la comprenne ou non, sinon nos valeurs s’évaporent et notre judaïsme se limite à une boulette.
Juif authentique
La Paracha nous raconte la mort de Aharon. Si on peut s’imaginer que Aharon décède parce que son heure est arrivée, Rachi a une autre lecture. La Tora nous dit que lorsque les Enfants d’Israël sont arrivés au frontière de Edom alors Aharon décéda (20-23,24).
Pourquoi préciser le lieu où se trouvait le peuple d’Israël ? Rachi commente : les Enfants d’Israël se sont trop rapprochés de Esav et ont épousé leur us, ils ont abîmé leur valeur, alors ils perdent le Tsadik ! C’est tout simplement ahurissant et exceptionnel : lorsqu’Israël imite les peuples ils causent la mort du Tsadik !!!
Le Gaon Rav Elh’anan Wasserman ztsal s’est évertué de rappeler, avant 1939, que le nationalisme est le danger de mort d’Israël. Un juif éloigné de ses valeurs juives c’est-à-dire Tora perd, dans certains cas son statut privilégié. La Tora nous répète trente-six fois que nous devons aimer le converti. Celui-ci même s’il est descendant de Haman et épouse notre Tora vaut plus que le juif qui a tout abandonné ! Nous voyons que seule la Tora donne un sens à notre existence de manière générale et de manière collective. Parce que seule la Tora définie en quoi nous sommes juifs.
Lorsqu’Israël a gardé ses distances avec les moeurs qui ne répondent pas à la Tora et ses valeurs alors il était protégé de tout drame, mais lorsqu’Israël se perd dans des enjeux hors Tora alors il perd son identité et ses Maîtres. Le tsadik meurt lorsqu’Israël se mêle à Esav. Les Maîtres de la Tora sont le rempart d’Israël, cela même les juifs les plus éloignés l’ont saisi, mais de certains qui pensent que les maîtres et ceux qui étudient la Tora ne servent à rien, alors ceux là disparaissent avant de voir ce que vont subir ceux qui restent.
Les sages ont instauré une bénédiction dans nos prières quotidiennes qui est réservée aux tsadikim ‘’al hatsadikim véal hah’assidim’’. Nous avons besoin des Maîtres, ils nous guident, ils nous protègent, apprenons à les garder précieusement, en commençant pas ne pas se perdre par des promesses alléchantes du monde extérieur.
Plus que les colonnes de gloire
La Paracha nous parle de l’épisode du décès de Aharon et qu’il fut enterré sur la montagne de Hor Hahar (20-27,28). Le Gaon Rav Ben Tsion Moutsapi chalita (Dorech Tsion page 394) rapporte au nom du Midrach : voilà que les colonnes de nuée accompagnaient les enfants d’Israël dans le désert et aplanissaient le sol, il n’y avait donc plus de montagne ? Le Midrach répond : les colonnes n’ont pas touché trois montagnes ; 1.
Le Mont Sinaï – sur lequel la Tora a été donnée, 2. Le Mont Névo – sur lequel Moché est enterré, 3. Le Mont Hor Hahar – sur lequel Aharon est enterré !
Ces trois collines sont supérieures que les colonnes de gloire ‘’anané kavod’’ qui protégeaient Israël. Cela veut dire que la Tora et ses Maîtres sont ce qui nous protège réellement et davantage que les colonnes de nuée. Et, si les colonnes n’ont duré que quarante ans, la Tora et ses Maîtres sont des valeurs intemporelles !
Hôpital ou Yéchiva
Les Maîtres expliquent longuement que le processus de la vache rousse contient quelques allusions sur notre rapport à l’étude de la Tora. Mais que vaut l’étude ? beaucoup pensent qu’étudier la Tora ça ne sert à rien, qu’il faut fermer les Yéchivot, qu’il ne faut pas envoyer son fils à la Yéchiva et sa fille au Séminaire etc. Donner de l’argent pour des arbres, ou des ambulances – oui ! Donner de l’argent pour étudier la Tora – non ! De tout temps des groupuscules, de juifs !, se sont battus pour fermer les Yéchivot, ils font plus de mal à notre peuple que n’importe quel terroriste ! il y a plus d’un siècle que le H’afets H’aïm a eu le projet de bâtir un hôpital juif respectant toutes les lois de la Tora. Pour cela il réunit des personnes influentes et riches pour les sensibiliser à ce projet. Ils répondirent présents. Il organisa sa quête en demandant à chacun combien de lits d’hôpital voulait-il offrir. L’un offrit deux lits, l’autre trois etc. Au milieu de cette réunion deux jeunes étudiants de Yéchiva se tenaient la porte et ont demandé à rencontrer le Hafets Haïm pour lui parler. Le Rav les fit rentrer et les invita à s’asseoir à côté de lui. Il parla avec eux quelques instants et suspendit la réunion. Les autres personnes présentes étaient étonnées du comportement du Rav. L’un d’eux avec insolence et cynisme demanda au Hafets Haïm combien de lits avaient offerts ces deux jeunes hommes ?! Le Rav répondit chacun d’eux a offert cinquante lits ! et plus encore, expliqua-t-il : chaque jeune qui étudie la Tora protège cinquante personnes et leur évite de tomber malade ! C’est la raison pour laquelle les maîtres enseignent au traité Méguila 16B « l’étude de la Tora vaut plus que de sauver des vies. Chaque heure d’étude c’est préserver des gens de la maladie et de la mort !