« Transformer le défaut en Qualité » – par Rav Moché Mergui, Roch Hayéchiva
La Torah expose dans la Parachah KI TISSA qu’au moment où Moché Rabénou se trouve sur le Mont Sinaï pour accueillir les deux Tables de l’Alliance, il reçoit l’ordre de descendre d’urgence de la Montagne. En effet, le peuple a commis la faute monstrueuse du « veau d’or ».
Dans le verset 8 du chapitre 32, la Torah détaille avec précision la faute :
1/ Ils se sont vite écartés de la voie que JE leur ai prescrite ;
2/ Ils se sont fait un veau en métal ;
3/ Ils se sont prosternés devant lui ;
4/ Ils lui ont offert des sacrifices ;
5/ Et ils ont dit : « Voici tes dieux qui t’ont fait monté du pays d’Egypte ».
Ce qui a provoqué la colère divine et la décision de les anéantir, c’est le fait que « J’ai vu ce peuple, est un peuple à la nuque raide [Kéché orèf] » (verset 9). Rachi explique : ils opposent leur nuque raide à ceux qui les réprimandent, et ils se refusent à les écouter.
Le Sforno explique pour sa part : leur nuque est comme une barre de fer, ils refusent d’écouter, de se remettre en question, c’est plus grave que la faute de l’idolâtrie, alors la colère d’Hachem s’enflamme pour les anéantir.
Moché Rabbenou, le défenseur permanent des Bene Israël, intervient de toutes ses forces, il implore la Clémence divine et n’hésite pas à dire (32-32) : « Et maintenant, si Tu pardonnes leur faute (c’est bien), sinon efface-moi de Ton livre que Tu as écrit ! ».
Au verset 9 du chapitre 34, Moché Rabbénou se permet de dire : « Si j’ai trouvé grâce à tes yeux, Mon Seigneur, que le Seigneur marche au milieu de nous car c’est un peuple à la nuque raide ».
Moché intervient et sollicite l’Aide divine afin d’accompagner les Béné Israël : il y a un espoir !
Il faut ainsi convertir le défaut de « Kéché orèf. » Cela signifie qu’il faut transformer le refus et la désobéissance à l’égard de la Parole divine de la sainte Torah en un tout autre refus, celui qui consisterait, en raison d’une menace de mort, à abandonner la Torah, ‘Hass Ve Chalom !
Cela signifie ainsi qu’il faut conserver cette qualité de « Kéché orèf », pour refuser énergiquement tout abandon, même infime, de la Torah. Il faut donc passer d’une mauvaise utilisation à une bonne utilisation de la nuque raide.
Mordeh’aï Hayéoudi nous a montré un exemple extraordinaire de « kéché Orèf », en refusant catégoriquement de se prosterner devant Aman qui se prenait pour un dieu.
Nombreux furent pendant l’inquisition en Espagne, les Bene Israël qui choisirent de mourir sur l’autodafé, plutôt que se convertir à une autre religion. Ils maintinrent leur Emouna en Hachem avec une nuque raide et une abnégation totale.
Le monstre nazi, imah’ chémo, que son souvenir soit effacé, n’a pas donné le choix aux enfants d’Israël et ils sont tous morts pour la Gloire divine.
AM KECHE OREF : le peuple possède la nuque raide pour proclamer de tout son coeur la fidélité à Hachem. C’est par cet argument que Moché Rabénou a convaincu Hachem et apaisé la colère divine : « Tu pardonneras notre iniquité et notre erreur, et Tu feras de nous Ton héritage ».
La faute du veau d’or
Cette semaine est la Hiloula de Rav Yeh’ezkel Lewinstein ztsal, mardi 18 adar (2 mars).
Voici un article lié à la paracha tiré de son Livre Or Yeh’ezkel Emouna page 103.
Notre Paracha nous raconte l’épisode douloureux de la faute du veau d’or. À la suite de cette faute commise, Moché Rabénou décida de briser les Tables de l’Alliance. C’est une des raisons pour lesquelles nous jeûnons le dix sept Tamouz. Briser les Tables cela veut dire que le peuple d’Israël n’est pas en mesure de recevoir la Tora. Il nous faut comprendre la gravité de la faute du veau d’or et la conséquence dramatique de ne pas être en mesure de recevoir la Tora et ce jusqu’à la brisée.
Il ne faut surtout pas expliquer cette faute comme étant de l’idolâtrie, voilà que nous sommes juste après le don de la Tora où le peuple d’Israël a atteint un très haut niveau, et justement la question s’intensifie : comment se fait-il qu’après l’évènement du don de la Tora ils ont pu commettre cette faute ?
Le Ramban dit clairement que les juifs n’ont certainement pas imaginé un seul instant que Moché était D’IEU et que Moché a réalisé tous les miracles de la sortie d’Egypte (les juifs ne sont pas stupides de substituer l’homme à D’IEU tout aussi grand soit-il tel Moché…). Ils se sont dit puisque Moché est mort faisons-nous un nouveau Moché. Ils ont très bien compris que Moché était le messager de D’IEU. Alors quelle est leur erreur ? Le Ramban explique que de certains qui offraient des sacrifices au veau pensaient véritablement à D’IEU mais d’autres pensaient au veau ! Comment ceux là ont pu se tromper et tout abîmer ? Parce que l’homme suit ses yeux, et lorsqu’il voit un veau il lui attribue une consistance jusqu’à la diviniser. L’homme peut être animé de tout élan positif, il doit surveiller ses yeux parce qu’ils ont une influence inouïe sur les choix que l’homme opère. Oui, il fallait briser les Tables pour annuler ce qu’ils voyaient. L’homme doit comprendre qu’il n’y a rien d’autre que D’IEU sur terre, tout le reste est leurre. De toute évidence l’homme pense que celui qui travaille gagne de l’argent et que celui qui ne travaille pas ne gagnera pas d’argent, que le malade qui consulte le médecin trouvera remède à sa maladie, et que celui qui ne consulte pas ne guérira pas, tout ça ne doit pas nous faire oublier que le réel guérisseur est d’IEU, que seul D’IEU est la source de notre gagne-pain ; mais l’homme vie de ce qu’il voit et là est le danger. Seul la Foi investie en D’IEU nous protège des erreurs assimilables au veau d’or, la Foi nous permet de ne pas suivre l’erreur de la vue ! L’exercice fabuleux de la Prière, à travers l’expression de nos requêtes, a pour objectif de marquer en l’homme cette foi authentique en D’IEU que lui seul nous donne le pouvoir d’agir, c’est bien là le fondement de la Providence (le manque de foi ne se définit pas comme étant celui qui rejette D’IEU, h’as véchalom, le manquement à la foi c’est de ne pas saisir que SEUL D’IEU agit dans le monde, et qu’IL nous donne la possibilité de vivre, celui qui reconnaît D’IEU mais omet cette notion de ‘’ene od milévado’’ qu’il n’y a rien d’autre que D’IEU il manque à la foi et se retrouve face à un veau d’or qui le conduit à commettre des horreurs…).
L’impôt de l’union
Cette semaine est la Hiloula de Rav Chlomo Yossef Zewin, vendredi 21 adar (5 mars).
Voici un article paru dans son Livre Létora Oulmoadim page 118.
Au début de notre Paracha la Tora demande que chacun apporte un demi-sicle « le riche ne donnera pas plus et le pauvre ne donnera pas moins » (30-15). C’est un impôt qui ne se calcule pas en fonction de la richesse et des moyens de chacun, c’est une somme fixe à chaque juif. Quel en est le sens ? Lorsque le riche donne plus que le pauvre il se sent supérieur, là la Tora veut que le peuple soit uni, et c’est cela la véritable définition de l’union : on est tous égaux et l’argent qui remplit ton compte en banque ne fait pas de toi systématiquement quelqu’un de supérieur aux autres ! C’est cet impôt-de l’union qui va nous sauver du décret de Haman !
Qui commande ?
La faute du veau d’or a marqué notre histoire, malheureusement pas dans le sens souhaité. Tous les maîtres de la Tora se sont penchés sur cette évènement dramatique. Quelle est véritablement la faute commise ? Pourquoi ont-ils été sévèrement punis ? Le Gaon Rav Avigdor Nevantsal chalita (Mitsion Miklal Yofi) relit les versets et déduit une notion fondamentale. Les enfants d’Israël se sont retrouvés dans une situation pensant que Moché était mort ! Ils étaient face à un dilemme, que faire ? En soi la question est noble et primordiale. Leur erreur est d’avoir pris des initiatives seuls sans consulter les maîtres de la Tora. Ce qui est fort intéressant à noter est que Moché lui-même les avait mis en garde et leur avait dit au chapitre 24 verset 14 « voilà que Aharon et H’our sont avec vous, celui qui a un problème qu’il s’approche d’eux ». Moché leur avait déjà conseillé de ne pas s’égarer des maitres de la Tora. Et non seulement qu’ils ne consultent personne, pire encore c’est eux qui dictent à Aharon ce qu’il doit faire ! Le peuple se met au-dessus de Aharon comme en témoigne le verset 32-1. Et lorsque H’our essaie de faire barrage au peuple, ils le tuent (voir rachi 32-5). On ne doit pas se demander quel est le rôle du Rav mais on doit demander au Rav quel est notre rôle…
C’est un vieux problème auquel le peuple d’Israël a déjà payé très cher cette erreur. Nous ne sommes pas si loin de Pourim où nous pouvons constater que Mordéh’aï n’est suivi par personne, lorsqu’il condamne ceux qui participent au festin de Ah’achvéroch et ceux qui se prosternent à Haman.
C’est vrai qu’il n’est pas facile de se soumettre aux autorités des Maîtres de la Tora, et qu’il est tellement plus facile de les tuer ou de les faire taire d’une façon ou d’une autre, ou encore de leur dire ce qu’ils doivent faire. De manière générale l’homme aime commander mais n’aime pas être commandé. On adore dire aux autres ce qu’ils doivent faire mais on est allergique à ce qu’eux nous disent de faire.
Le Rav Y.D. Soloveitchik explique que c’est la source de tous les innovateurs qui ont abîmé des principes fondamentaux de la Tora et du judaïsme tout entier parce qu’ils ont innové des théories et des manifestations sans consulter les Maîtres pour s’assurer de leur validité (voir Daroch Darach Yossef).
Le feu de la Tsédaka
Au début de notre Paracha D’IEU commande Moché de dire aux enfants d’Israël d’apporter un demi-sicle afin de trouver le pardon. Le Midrach enseigne que Moché rencontra des difficultés à propos de cette pièce, alors D’IEU lui montra la pièce en feu et lui dit voilà ce que les Enfants d’Israël doivent apporter.
Quelle difficulté y-a-t-il d’apporter une pièce ?
Rav Pasin (Potéah’ Et Yadéh’a volume II page 114) rapporte au nom du Avné Hamakom : Moché avait du mal à comprendre comment une si petite pièce est elle à même d’apporter le pardon sur une faute aussi grave que l’idolâtrie commise par le peuple ?! Sur quoi D’IEU lui montre une pièce de feu, qu’une petite flamme repousse par sa lumière beaucoup d’obscurité, ainsi est la force de la Téchouva, un tout petit effort repousse l’obscurité causée par la faute.
Rav Pasin poursuit, le roi Chlomo a dit (Michleï 10-2) « la tsédaka sauve de la mort », toutefois il ne précise pas la somme qu’il faut offrir pour obtenir un si grand bénéfice. Quel que soit le don apporté, il sera à même de préserver de la mort ! Cette faculté provient de l’élan de feu avec lequel on donne la tsédaka.
Cependant l’élan ne suffit pas !
L’élan témoigne de notre volonté de donner de la tsédaka, et cette volonté accompagnée du geste a le pouvoir de sauver du pire !
Pourquoi ? Comment ça marche ? tout d’abord parce que c’est un commandement de la Tora, cette Tora est notre vie. La tsédaka avec élan montre qu’on est soucieux du besoin de l’autre, lorsqu’on se tourne vers l’autre on connaît un apaisement du jugement divin, si l’autre m’intéresse et je ne suis pas indifférent à son problème, je connaîtrais le même sort de la part de D’IEU. N’oublions pas qu’il n’est pas facile de partager de son argent avec l’autre, et avec le sourire. Cet effort de donner nous protège inconditionnellement de tous les maux !
Le feu de la tsédaka répare le pire…
La Fourmi 1 – par Rav Imanouël Mergui
Non, je ne fais pas une étude scientifique sur les insectes, mais il y a des enseignements de nos Sages qui attirent mon attention et j’aime les partager. Au traité Pésah’im 24A le Talmud nous enseigne « celui qui mange une fourmi transgresse cinq fautes… ». Certes il ne viendrait à l’idée de personne de manger une fourmi, quoi que… c’est incroyable qu’il soit donc plus grave de consommer une fourmi que du porc ! Plus l’aliment pas cachère est petit plus il est grave de le consommer. Toujours aussi surpris que l’infiniment petit occupe finalement une place plus importante dans notre vie que ce qui est plus grand. Pour ne citer qu’un exemple, le coronavirus, probablement invisible a déstabilisé toute la planète ! Il a fait plus de dégâts que les guerres, le terrorisme etc. Vous avez déjà certainement fait le constat par vous-mêmes. Je ne suis pas prophète, vous le savez, mais pourquoi est-ce ainsi ? Aucune idée, en tout cas surgit en mon esprit une spéculation : je crois que depuis des décennies l’humanité a mis de côté les ‘’petits’’. Quel que soit le domaine de la vie on a pris en compte uniquement les riches, les intellectuels, etc., mais on a beaucoup négligé les gens moyens voire négligeables. C’est dramatique, comme si ceux qu’on ne considérait point n’avaient pas le droit d’exister. Ce n’est qu’un exemple parmi des milliers. Même dans notre propre vie personnelle, on a fait une grille des choses importantes et des choses qui le sont moins. Mais en vérité toute la question est là : qu’est-ce qui est véritablement important et qu’est-ce qui l’est moins ?! Qui définit la valeur des êtres, des lieux, des objets etc. Et là on est confronté à un virus si petit qui occupe TOUTE la planète. Aucun coin du monde n’en est épargné. C’est à la fois ahurissant qu’exceptionnel ; la question est de savoir comment on se confronte avec ce qui est plus petit que nous ? C’est, entre-autre, l’histoire de David et Goliath, ou encore de Chimchon et les Phélistins. Le plus grand se croit toujours le plus fort et donc infaillible jusqu’à ce que le plus petit vienne et le déstabilise. Le Gaon Rabi Eliyahou de Vilna avait entrepris de quitter la Lithuanie pour se rendre en Erets Israël. Son voyage était long, ne serait-ce que pour arriver au port et prendre le bateau. Il monte dans le bateau se renseigne sur ce qui lui était important au niveau de la Tora, et quelques instants plus tard avant le départ du bateau il décide de descendre et de revenir à Vilna. Nul ne sait pourquoi il se rétracta et n’entrepris pas son voyage vers la Terre sainte. Un de ses élèves a expliqué la raison pour laquelle le Gaon ztsal rebroussa chemin. Le Gaon a demandé à visiter les cuisines pour s’assurer qu’il pouvait manger quelques aliments durant son voyage. Il constata que dans la cuisine du navire il y avait des fourmis !!! Il se dit qu’il est inacceptable de partir vers la terre sainte s’il y a un risque de consommer de la nature où des fourmis se baladent ! Parce que chaque fourmi c’est bel et bien cinq transgressions de la Tora. Comment envisager un voyage vers Erets Israël en prenant le risque de manger une fourmi ?! Seul le Gaon pouvait nous livrer cet enseignement majeur !!! Cela nous paraît démesuré et extrême. En tout cas cela nous fait réfléchir sur les valeurs, et sur la dimension de l’infiniment petit. La société de consommation nous a éloigné de l’essentiel, et nous a conduit à tout jeter à la poubelle même des gens et des objets de valeur. Au quart de tour on met à la porte son conjoint comme si c’était une vielle chaussette.
Et lorsqu’on néglige ne serait-ce que le plus petit élément et la plus petite créature alors on exprime notre insensibilité à la vie tout entière. Qui mange une fourmi, fini par manger l’autre, tout autre soit-il.
Que peut-on encore apprendre de la fourmi ?
Pour un premier épisode c’est déjà énorme, me semble-t-il, mais je vous dit à la semaine prochaine pour La Fourmi 2 !