« L’Objectif ! » – par Rav Moché Mergui, Roch Hayéchiva

La Torah dit (PARACHAT EMOR 22- 32et33) : « Vous gardez Mes commandements, et les pratiquerez : JE SUIS HACHEM.Vous ne profanerez pas Mon saint Nom, afin que Je sois sanctifié au milieu des enfants d’Israël, JE SUIS HACHEM qui vous sanctifie, Qui vous ai fait sortir du pays d’Egypte pour être votre D., JE SUIS HACHEM ! »

L’Assemblée d’Israël a pour mission :

1/ de veiller à ne pas profaner le Nom divin, le Nom de Ma sainteté, en évitant absolument, et en toute circonstance, la non-observance de Mes Mitsvoth. Car ce serait un H’ILOUL HACHEM. Il faut, au contraire, en permanence sanctifier le Nom divin au sein des Béné Israël : c’est cela le KIDOUCH HACHEM !

Rachi explique : « Je vous ai fait sortir d’Egypte AL MENAT, c’est-à-dire à la condition que vous sanctifiez MON NOM. » Comment atteindre l’objectif de sanctifier le Nom divin ? Par l’observance de Mes commandements.

Rachi poursuit : c’est par l’Etude de LA MICHNAH. En effet, seule l’Etude de la TORAH orale permet d’avoir une parfaite connaissance de la Volonté divine et des Mitsvoth.

2/ Pratiquez-les : c’est la mise en application des 613 Commandements. Avec la même motivation que nous observons les Mitsvoth verticales, c’est-à-dire vis à vis d’Hachem, ainsi nous devons appliquer les Mitsvoth horizontales, celles vis à vis de notre prochain.

« Ne déshonorez pas Mon SAINT NOM ! » Car le H’ILLOUL HACHEM est le résultat de la non- observance.

« Afin que Je sois sanctifié au milieu des enfants d’Israël » : cet objectif est atteint par le programme qui combine l’ETUDE de la Halakh’a et une pratique conforme à la Volonté divine.

Le RAMBAM précise dans YESSODE HATORAH (5-11) « La Torah exige de l’homme érudit et parfait dans ses actes d’être extrêmement prudent, de ne pas provoquer par son comportement un H’ILOUL HACHEM. Cela signifie : Ne déshonorez pas le NOM SACRE !

Rappelons que le mot H’ILOUL signifie aussi H’ALLAL [vide], c’est-à-dire créer un vide de la Présence divine.

Le KIDDOUCH HACHEM c’est justement, et au contraire, créer la place pour la Présence divine !

Pour atteindre l’objectif qui est de sanctifier le Nom divin, l’être humain doit être toujours irréprochable devant HACHEM et devant les créatures.

L’aventure du ‘’moi’’ 2 – par Rav Imanouël Mergui

Tout appareil qu’on possède, afin de l’utiliser correctement ses fabricants se soucient de lui attribuer un mode d’emploi afin de l’utiliser correctement et d’exploiter ses atouts. Celui qui utilise un appareil quelconque en ignorant ce mode d’emploi il ne peut qu’abîmer l’appareil. L’être humain connaît cette même règle. Comment faire bon usage de soi si on n’a pas appris ce que nous sommes ?! Qui peut prétendre se connaître correctement sans apprendre ce qu’il est ?! Ne pas apprendre ce qu’on est c’est se méconnaître. Soi on se ment et on pense se connaître, soi on est conscient qu’on se méconnaît et volontairement on veut ignorer ce qu’on est. Dans ces deux cas on passe à côté de quelque chose d’essentiel, on évite notre être et toute notre vie est biaisée !

Tous les matins nous récitons deux bénédictions fantastiques : 1) acher yatsar, 2) élokaï néchama. La première traite du corps et la seconde traite de l’âme. Cela est évident que l’être se défini par ces deux pôles : le corps et l’âme. Pour faire bon usage de soi, on se doit de définir ces deux aspects de notre être. Ceci implique trois étapes fondamentales :

1) Qu’est-ce que le corps ?

2) Qu’est-ce que l’âme ?

3) Comment les harmoniser ?

Il y a dans l’ordre de ces deux bénédictions quelque chose de fantastique : les Sages ont précédé la bénédiction du corps à celle de l’âme ! D’abord on bénit D’IEU de nous avoir donné un corps qui fonctionne, et ensuite on bénit D’IEU de l’âme pure qui habite et anime notre corps ! Il est donc d’une extrême nécessité d’étudier avec profondeur ces deux bénédictions qui sont le mode d’emploi de notre être.

Notons encore un point majeur. Les sages ont institué qu’à chaque fois que nous allons aux toilettes dans la journée pour faire nos besoins nous devons réciter la bénédiction de acher yatsar, donc ce sont plusieurs fois par jour que nous louons D’IEU à propos de notre corps. Pour l’âme ce n’est qu’une fois par jour, au réveil, que nous louons D’IEU!

Tout ceci n’est pas anodin. Cela peut avoir plusieurs raisons : le corps est le moyen sûr d’accéder au divin, ou au contraire le corps est ce qui risque de nous éloigner de D’IEU. Ces deux idées ne sont pas contradictoires, bien au contraire elles sont complémentaires ; parce que, ce qui est à même de nous éloigner le plus de D’IEU est à la fois ce qui est susceptible de nous ramener le plus à D’IEU. Comment ? Si on n’étudie pas le mode d’emploi du corps alors on tombe dans l’aspect grossier du corps, son côté matière et là on s’éloigne de D’IEU parce qu’on s’éloigne de soi. Celui qui méconnaît son corps en fera mauvais usage et donc à travers le corps il s’éloigne tous les jours de lui-même et donc de D’IEU ! Si au contraire on apprend ce qu’est notre corps alors on saura en faire bon usage, on sera en harmonie avec soi même et on l’utilisera à bon escient ainsi on retrouvera D’IEU à travers notre corps.

Il reste surprenant que nous ne récitions la bénédiction de l’âme qu’une seule fois par jour ! On reparle clairement de l’âme dans les Psaumes de David que nous prions tous les matins dans le dernier Halélouya ‘’kol hanéchama téhalel ya’’ ! Je vois à cela plusieurs raisons. Dans un premier temps la bénédiction de l’âme si elle est récitée avec toute son intensité elle est suffisante une fois par jour. On peut dire encore : le corps connaît un tel danger de s’éloigner de soi et de D’IEU qu’il faut qu’on se le dise plusieurs fois par jour que le corps n’est pas que matière. Et enfin on avancera encore, il n’est pas de grand intérêt de parler de son âme tant que nous n’avons pas appris à connaître notre corps…

En vérité ces deux bénédictions du matin sont précédées par deux autres passages : 1) modé ani – nous exprimons notre reconnaissance à D’IEU qu’IL nous a rendu notre âme !, 2) âl nétilat yadaïm – une bénédiction spécifique sur nos mains ! Là c’est l’âme qui est citée avant le corps, avant les mains. Il nous faut réfléchir sur ces deux notions afin de vivre en harmonie. La reconnaissance des bienfaits que D’IEU nous offre est ce par quoi nous débutons notre journée, dès le réveil nous apprenons à dire merci à D’IEU pour tout ce qu’IL nous octroie et en particulier de nous avoir rendu l’âme (en français ‘’rendre l’âme’’ c’est mourir, dans nos prières

‘’rendre l’âme’’ c’est vivre…). Avec un peu de bon sens, et de façon spontanée puisque dès le réveil où notre cerveau et notre corps sont encore un peu endormis, on dit merci à D’IEU pour l’âme. Les mains représentent le produit de l’homme. Ce produit qui risque d’éloigner l’homme de l’existentiel. On doit ramener nos mains à D’IEU, à l’âme… Celui qui sait dire merci sur son âme saura utiliser correctement ses mains. Si l’âme est liée dès le démarrage de la journée dans la bénédiction du remerciement c’est dire que la faculté première de l’âme c’est de reconnaître et de remercier. Ce remerciement vient exprimer cette prise de conscience qu’il y a autre chose que moi-même, on dit merci à ‘’l’autre’’. C’est ne pas s’emprisonner dans notre ego. La connaissance de soi a pour but l’ouverture de soi vers un univers existentiel et non introverti. L’homme a souvent l’impression que sa vie ne toure ‘’que’’ autour de lui, l’autre l’effraie, à plus forte raison lorsqu’il s’agit de se tourner vers D’IEU, qui sommes toutes c’es LUI qui nous offre la vie. L’âme rappelle le corps à l’homme, non pas pour le cloisonner mais au contraire pour lui donner la possibilité de s’épanouir. Tout être humain cherche l’épanouissement de soi, mais épanouissement n’est synonyme de s’évader de soi. Apprendre à se connaître c’est prendre conscience de ce que nous sommes pour être ce que nous sommes en mesure d’être, au niveau du corps et de l’âme et de leur conjugaison !…

Parachat Emor

L’enfant dans le monde des adultes

Notre Paracha ouvre en ces termes, D’IEU parle à Moché et lui dis « dis aux Cohanim et tu leur diras » (21-1). La question saute aux yeux : pourquoi répéter deux fois que Moché doit dire aux Cohanim ? Rachi commente : dis aux Cohanim qu’à leur tour ils doivent dire, c’est pour que les adultes s’adressent aux enfants et leur disent ce qu’ils doivent faire.

Le Gaon Rav Mechoulam David Soloveitchik ztsal soulève une question fondamentale (que je formulerais ainsi) : en quoi consiste le devoir qu’a l’adulte envers l’enfant, est-ce un devoir de ne pas laisser l’enfant fauter, ou bien est-ce le devoir de l’adulte envers lui-même, ce devoir que l’adulte a ce n’est pas pour corriger l’enfant mais c’est parce que l’adulte n’a pas le droit de voir et laisser un enfant fauter ? (voir tout son développement).

La question est majeure : lorsqu’on voit un enfant faire une bêtise est-ce que nous sommes gênés de voir que cet enfant ne suit pas le bon chemin, ou bien est-ce que nous sommes gênés d’avoir un enfant peu correct, comme si cela touchait notre honneur. Si ton enfant a une mauvaise note tu es dérangé pour ton ego ou pour l’avenir de l’enfant. Une maîtresse qui sort un enfant de la classe est-ce que c’est parce qu’elle est débordée et ne sait plus quoi faire de cet enfant ou bien est-ce que c’est pour lui donner une leçon de vie ?

Lorsque des parents punissent un enfant c’est pour être tranquille ou est-ce que c’est pour qu’il comprenne son erreur et s’améliore ? ETC., autant de questions fondamentales dans le rapport adulte/enfant. Ou peut-être, comme nous l’enseigne notre Grand Maître Rav Chlomo Wolbe ztsal (Alé chour I), éduquer nos enfants c’est apprendre à développer notre être adulte. Qui est la cause, qui est la conséquence. Est-ce les parents qui sont au service des enfants ou les enfants au service des parents. Ce qui est clair c’est qu’on ne peut pas être un bon éducateur si on n’a pas un regard tourné ers l’enfant, ceci est peut-être un pléonasme mais avec un peu d’honnêteté on se rend vite compte que nous cherchons, nous adultes, bien souvent notre intérêt plutôt que celui de l’enfant. Ce rapport intergénérationnel a soulevé d’innombrables thèses et lois et ne cesse de nous poursuivre pour ainsi écrire l’histoire de demain. Offrons-nous la possibilité à nos enfants de vivre leur vie, ou bien nous espérons qu’ils vivent notre vie ?! Les adultes avec leur vécu et leurs expériences veulent transmettre des valeurs aux enfants, ce qui est noble en soi, la question est de savoir si on s’y prend bien. Parce qu’une chose est sûre c’est que les adultes oublient qu’un jour ils étaient enfant ! Bien souvent on voit l’enfant comme un adulte et on oublie même qu’il n’est encore qu’un enfant.

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Le blasphémateur

A la fin de notre Paracha nous lisons l’épisode du blasphémateur (chapitre 24 verset 10). Comment est-ce possible qu’un homme puisse blasphémer, surtout après tout ce que les enfants d’Israël vécurent depuis l’Egypte ?!, s’exclame Rav Kats de Telz (Ets Hadaât page 66).

Il répond, il y a des gens qui renient D’IEU même lorsque D’IEU se dévoile à eux et leur montre un visage agréable ! Comment ça marche ? Tu vois D’IEU, la situation est très claire, et pourtant tu continues de t’entêter dans ton reniement ! Parce que ta foi n’est pas convaincue !

Il y a des gens qui disent : quand D’IEU me sourira alors je reviendrais vers Lui. Ce sont des menteurs, D’IEU s’est dévoilé à toi et continue de te sourire et tu prétends encore qu’Il n’est pas là. C’est de la mauvaise foi, c’est le cas de le dire, ta foi est mauvaise.

Celui qui croit en d’IEU sait le voir même lorsque D’IEU se cache, et celui qui ne croit pas en D’IEU continue de le renier même lorsque manifestement D’IEU est devant ses yeux !

Rachi rapporte l’enseignement de Rabi Lévi « d’où est sorti ce blasphémateur ? Effectivement lorsque la Tora ouvre cet épisode elle dit « le fils de la femme Israélite est sorti » ? Il est sorti de son monde !

Rabi Yérouh’am ztsal (Daât Tora) explique cet enseignement à travers la Michna de Avot (4-21) « la jalousie, la recherche des désirs et des honneurs sortent l’homme du monde », cela veut dire que même de son vivant l’homme est capable de sortir du monde, et ce par les vices qui l’animent.

Les vices mettent l’homme en marge de sa propre vie !

Le Rav poursuit : les Maîtres enseignent dans la Matnita il est sorti condamné du tribunal de Moché Rabénou ! Il a refusé le verdict de Moché ! C’est incroyable, lorsqu’on se détourne de la décision des Maîtres de Tora on en arrive à blasphémer D’IEU !

Cela veut dire que le plus grand respect qu’on peut témoigner envers D’IEU c’est d’écouter les maîtres !

Notre Grand Maître Rav Chlomo Wolbe ztsal (Chiouré H’oumach page 112) propose la réflexion suivante : cet homme est sorti de la Yéchiva et est allé se promener dans la rue ! Lorsqu’un juif sort de la maison d’étude il s’expose au danger de la rue. Cette rue a eu une influence des plus dramatiques sur notre histoire. La place du juif n’est autre que la synagogue et la maison d’étude, tout le reste est pour lui une telle agression qu’il en devient un blasphémateur !

Le Tsadik Rav Chalom Chwadron ztsal (Lev Chalom page 301) propose une autre lecture : il est sorti de son monde, cela veut dire qu’il s’est créé son propre monde, il s’est détaché du monde à suivre, il s’est forgé une nouvelle vision du monde – ceci expose l’homme au danger de planifier une nouvelle ère, certes l’homme a le droit de réfléchir et d’avoir des idées mais il doit s’assurer que ce n’est pas que son monde qu’il doive voir ! C’est un appel de mise en garde envers ceux qui se prétendent visionnaire de nouvelle ‘’chita’’ (mode de pensée) qui ne font qu’abîmer les chemins tracés par les Maîtres de la Tora !

C’est la raison pour laquelle le Mesilat Yéchari ouvre son Livre « l’homme doit s’assurer de voir clairement quel est son devoir dans son monde », certains expliquent ‘’son’’ monde c’est le monde de D’IEU, d’autres expliquent ‘’son’’ monde c’est le monde de l’homme, et ils se complètent : l’homme doit s’assurer que son monde est bel et bien en coordination d’avec le monde de D’IEU!

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