« L’Inspiration Divine » – par Rav Moché Mergui, Roch Hayéchiva
La Parachat PEKOUDE nous présente l’artisan en chef, en la personne de Betsalel, qui est chargé de construire le Sanctuaire et tout ses éléments. La Torah précise à ce sujet (Chemot 35-30) : « Moché dit aux enfants d’Israël : ‘Voyez, Hachem a désigné nommément Betsalel, fils de Ouri, fils de H’our, de la tribu de Yéouda. Hachem l’a rempli d’une inspiration divine, de sagesse, d’intelligence, de connaissance et d’aptitude pour tous les arts.’ » La Torah souligne l’origine de Betsalel, fils de Ouri, fils de H’our.
H’our est le fils de Myriam et de Calev ben Yéfouné. H’our est le seul homme qui a eu le courage de s’opposer aux enfants d’Israël au moment où ils s’apprêtaient à commettre la faute du Veau d’or, et il l’a payé de sa vie.
Calev Ben Yefouné est celui qui, avec Yoshoua bin Noun, s’opposera au découragement né du compte-rendu pervers des explorateurs, et qui demandera aux Bene Israël de garder toute leur confiance en Hachem.
Myriam, la mère de H’our, a eu l’audace de dire à son père Amram, le grand de la génération : « ton comportement est plus sévère que le décret de Pharaon. Ce dernier a condamné les garçons à la noyade et ton propre comportement, en te séparant de maman (Yokhéved), aura pour conséquence qu’il n’y aurait plus de naissance ! »
Amram apprécie alors la remarque justifiée de sa fille Myriam, et ses parents donneront ainsi naissance à Moché Rabbénou.
Quatre-vingts années plus tard, le jeune Betsalel, âgé de 13 ans, animé d’une Inspiration divine, prend exemple de ses grands-parents, et en particulier de son arrière-grand-mère Myriam, en se permettant de suggérer à Moché de modifier le programme que notre Maître lui a proposé.
En effet, Moché Rabénou avait ordonné à Betsalel de fabriquer d’abord les objets sacrés qui étaient l’essentiel du Tabernacle puis, ensuite, le Tabernacle. Betsalel propose de procéder autrement : d’abord, on construit la maison pour accueillir les éléments sacrés et en particulier l’Arche Sainte. Moché Rabbenou s’écria : « c’est justement ce que j’ai entendu de la Bouche du Saint Béni soit-Il !»
La grandeur de Moché Rabbénou réside dans la capacité d’écouter la voix du plus petit que lui. C’est cette harmonie merveilleuse qui a fait descendre la Chéh’ina, la Présence divine, dans le Sanctuaire !
Miroir
La Paracha nous dit que le ‘’kiyor’’ bassin d’eau depuis lequel les Cohanim se lavaient les mains et les pieds avant le Service était fait à partir des miroirs que les femmes ont apporté pour la construction du Tabernacle – voir 38-8.
Onkelos rajoute un point intéressant : c’étaient les miroirs des femmes qui venaient prier au Sanctuaire !
Il y a miroir et miroir. Certes une femme qui donne son miroir au temple témoigne d’un élan très fin. Effectivement le miroir de la femme est son outil esthétique, il faut être capable d’offrir à D’IEU son bien le plus cher. Ne donne pas-t-on notre vieux talith à la synagogue ?! Ou encore nos vieux vêtements aux pauvres ?! Donner ce qui nous est le plus cher est une grande vertu !
Pourquoi Onkelos rajoute le miroir des prieuses ? Quel rapport y-a-t-il entre la prière et le miroir ?
Le miroir est l’outil dans lequel on se regarde, on devient le nombril du monde, on est porté sur soi. La prière on sort de soi, on met notre ego de côté, on prie pour D’IEU et pour les autres, on se ‘’démiroirise’’. Si offrir notre bien le plus cher à d’IEU et à l’autre c’est une grande vertu, celui qui offre cet outil à travers lequel il existe et le donne à l’autre c’est encore plus fort. Le Cohen ouvre tout service en se lavant dans ce bassin qui témoigne de l’effacement de soi en faveur de l’autre, c’est ainsi qu’on se rapproche de D’IEU et qu’on entre dans le sanctuaire !
Les Femmes et le Sanctuaire
Notre Paracha qui traite de la construction du Sanctuaire, ne manque de rappeler plusieurs fois l’élan et la participation des femmes à cette oeuvre. La mission d’une femme n’est pas de gérer la synagogue ou plus fou encore de devenir le rabbin ! La mission de la femme est de bâtir le sanctuaire ! Ceux qui croient que la femme a une place non reconnue dans la Tora sont des ignorants et des dégénérés, c’est un mensonge grotesque. Voir 35-26 dans la Paracha.
Le Rabi de Nadvorna lors du décès de sa mère expliqua : le roi Chlomo a dit « écoute mon fils la transmission de ton père, et ne t’égare pas de la Tora de ta mère ». La question s’impose, de quelle Tora de la mère parle-t-on ? La femme n’est pas tenue d’enseigner et d’étudier la Tora au même titre que le père. Le père a le devoir d’enseigner la Tora à son enfant, mais le rôle de la mère dans cet enseignement est encore plus important, c’est elle qui imprime la maison d’un environnement de Tora, elle encourage et élance son enfant à la Tora. La mère a ce rôle suprême d’éveiller son enfant à la Tora, elle lui fait aimer la Tora.
Lorsqu’un juif russe est arrivé en Erets Israël on lui demanda s’il était Cohen, Lévi ou Israël, il ne savait pas. On l’interrogea s’il avait quelques souvenirs de son enfance. Il raconta que chaque veille de fêtes sa mère achetait une nouvelle paire de chaussettes à son père et elle exprimait une joie particulière ! Rav Yitsh’ak Zilberstein chalita en conclut qu’il était Cohen ! Expliquant qu’en dehors d’Israël les Achkénazim ne font la Birkat Cohanim uniquement lors des trois fêtes ! C’est la raison pour laquelle la mère achetait une nouvelle paire de chaussettes à son mari et en exprima toute sa joie. C’est cela le rôle de la mère, montrer aux enfants la joie de réaliser la Tora. (voir Alénou Léchabéah’ Chémot page 543).
C’est là toute la place de la femme, et même dans le sanctuaire on a besoin de cet élan féminin.
La femme est là, dans le judaïsme elle occupe une place des plus nobles.
L’or
Au chapitre 38 verset 24 la Tora dit « tout l’or a été utilisé pour le travail du Sanctuaire ». Pourquoi cette précision ‘’tout’’ ?
Le Or Hah’aïm explique : d’ordinaire dans tout travail soit-il il y a des chutes, et là il y eut un miracle tout l’or a été utilisé, il n’y eut aucune perte !
Lorsqu’on investit dans l’oeuvre divine il n’y a aucune perte, chaque millimètre de matériaux est utilisé à bon escient, écrit le Gaon Rav B.T. Moutsapi chalita (Dorech Tsion page 836).
Le H’ida zal donne une autre réponse : l’or a été créé dans le monde uniquement pour servir D’IEU en érigeant le Sanctuaire, c’est le sens du mot ‘’tout’’ l’or.
Tout ce que D’IEU a créé dans le monde c’est dans un but bien précis. L’or n’est pas là pour montrer la richesse de l’homme mais pour honorer D’IEU. On doit offrir à D’IEU le meilleur. On doit investir dans notre Tora avec les plus beaux éléments que nous possédons, on ne garde pas le meilleur pour soi et le moins honorable on l’offre au Temple.
On peut relier les deux commentaires, si on s’évertue d’offrir le meilleur à D’IEU et à sa Tora on ne connaît aucune perte !
N’oublions pas l’objectif
Au chapitre 39 verset 32 la Tora dit « le travail du Sanctuaire fut achevé, les Enfants d’Israël firent selon tout selon ce que D’IEU ordonna à Moché ».
La structure du verset nous laisse entrevoir que les Enfants d’Israël ont fait quelque chose après que tout a été terminé ! Que manquait-il au Sanctuaire alors que tout le travail est achevé ?
Rav Wallah’ (Maâyan Hachavouâ page 579) rapporte le commentaire du Sifté Cohen : l’objectif du Sanctuaire n’est autre que ‘’Je résiderais parmi vous’’, après la construction il fallait s’investir pour atteindre cet objectif ! Il ne fallait pas oublier l’objectif final vers lequel était orienté tout e travail.
C’est incroyable, l’homme bâtit, investit, etc. mais il rencontre le danger d’oublier la raison pour laquelle il fait tout cela. Ce qui est encore plus incroyable c’est que ce phénomène existe même dans la Tora, même ce que l’on fait POUR D’IEU on rencontre cette problématique : manquer l’objectif ! C’est ainsi que le Mesilat Yécharim ouvre son Livre : l’homme doit toujours garder en mémoire quel est le but de sa vie !…
Le Rav ne nous dit pas cependant qu’ont-ils fait pour atteindre l’objectif ?
Il me semble qu’on trouve la réponse dans notre verset même « ils ont fait tout ce que D’IEU avait ordonné à Moché ». Suivre la voie divine en restant attentif à l’enseignement des Maîtres. Les Enfants d’Israël n’ont rien manqué à ce que D’IEU leur dictait de ce qu’il avait reçu de D’IEU. Lorsqu’on s’éloigne de la Parole des Maîtres on prend le risque de passer à côté de l’objectif…
La Fourmi 2 par Rav Imanouël Mergui
Avançons à pas de fourmis, mais avançons donc. Combien de pas a fait notre fourmi depuis notre précédent article ? Pas beaucoup, enfin tout est relatif, pour l’humain le pas de fourmi ne représente pas grand-chose, mais pour la fourmi un pas de fourmi c’est immense. Est-ce réellement ainsi ?
Le Roi Chlomo a dit « paresseux vas contempler la fourmi et ses voies ainsi tu deviendras sage ! etc. » (Michleï 6-6 à 8). Les Maîtres s’interrogent : qu’a-t-il vu le Roi de si impressionnant chez la fourmi pour inviter le paresseux à apprendre d’elle ? Une fourmi ne vie pas plus que six mois, et elle ne consomme qu’un grain et demi de blé durant sa vie ; et pourtant elle passe l’été à ramasser tout ce qu’elle trouve ! Pourquoi ramasser autant si elle n’a pas besoin de tout cela ? Rabi Tanh’ouma enseigne : elle engrange toutes ces quantités, parce que la fourmi se dit ‘’peut-être que D’IEU décrètera d’allonger ma vie, s’il en est ainsi j’aurais préparé mes jours à venir’’. (voir Dévarim Raba V-2).
Ici il est écrit quelque chose d’immense (et de sympathique) : la fourmi ne se limite pas à ce qu’elle a toujours connu, une fourmi n’a jamais vécu jusqu’à l’âge de cent vingt ans ! Et pourtant elle y croit, elle espère, elle s’investie, elle avance. En simple la fourmi avance à pas d’humains !
C’est là tout le problème du paresseux, lui avance à pas de fourmi, on l’invite à regarder la fourmi qui elle s’active à pas humains. D’IEU a créé une créature aussi petite, peut-être insignifiante, personnellement je ne sais même pas à quoi servent les fourmis dans notre monde ?! Peu importe, elle est là pour nous apprendre à croire sans fin, à vivre dans l’espoir inimaginable. Ce n’est pas qu’un jour une fourmi a fêté sa bar/bat mitsva, elle ne dépasse pas un an de vie mais croit aux cent vingt ans. Il n’y a pas de fatalité, j’y crois c’est tout, c’est simple. Il n’y a pas une seule fourmi sur des milliards de fourmis depuis plus de cinq mille ans du monde qui dépasse les six mois de vie impartis, les fourmis n’ont pas de référence de se dire notre ‘’fourmi ancêtre’’ dépassée les six mois, non rien de tout cela, elle a été créée pour nous dire d’avancer en espérant et surtout en croyant au meilleur, au maximum. Ne pas se suffire d’un minima mais d’aspirer à plus que le maximum. L’opposé du minimum n’est pas le maximum, mais le plus que le maximum est le contraire du minimum !
Je m’interroge d’où lui vient cette idée de penser que D’IEU va lui rallonger sa vie ?
En réalité il faut renvoyer cette question à l’homme : d’où nous vient l’idée qu’on ne peut pas accéder au davantage ? Pourquoi on se renferme dans nos idées emprisonnâtes de la vie ? Pourquoi voir la vie comme une fatalité que rien ne peut être mieux qu’hier ?
Ici le Midrach nous enseigne une idée d’une extrême profondeur, si tu ne crois pas au meilleur, et surtout si tu n’aspires pas au meilleur, c’est que tu es plongé dans la paresse ! Ce n’est pas qu’un manque de Foi en D’IEU c’est surtout que tu penses que tu ne serres à rien dans la vie, donc si elle s’arrête maintenant ou après tu n’en vois aucun inconvénient.
Si tu crois en toi, tu t’investis et pas uniquement pour tes cent vingt ans mais pour l’au-delà de tes années prévues. Tu bâtis un monde auquel tu te dis que c’est peut-être toi-même qui en jouira. On ne bâtit pas seulement l’avenir des générations futures, on bâti son propre avenir infini et indéfini. Telle la fourmi qui entasse, engrange sans cesse pas seulement pour préparer l’avenir des fourmis de la nouvelle génération, chaque fourmi espère faire partie de la génération qui arrive, chacune pense à son avenir rêvé ! Fantasme ou réalité, peu importe, la vie ne s’arrête pas elle avance au rythme de tes espérances.
Avancer à pas de fourmi est donc la plus belle bénédiction qu’on puisse souhaiter à l’homme.
Le Yédé Moché s’interroge, pourquoi le Midrach nous dit que la fourmi ne vie que six mois alors que le Talmud enseigne qu’elle vie douze mois ?
Parce qu’elle vie six mois, mais les six premiers mois de sa mort elle est encore entière, elle ne se désintègre pas immédiatement ! – elle continue de croire qu’elle va se réveiller !
C’est sublime !